CRITIQUE DU LIVRE DE JOHN GRAHAM: WHOSE MAN IN HAVANA? Par Jean-Pierre Juneau (Review)

 

Attiré par le titre de ce livre qui m'amena à penser  que j'aurais quelques belles heures de lectures devant moi,  consacrées à notre politique à l'égard d'un pays dont l'histoire politique contemporaine m'a toujours intéressé, j'ai donc acheté le livre de John en ligne, mais fus d'abord un peu étonné par le contenu de la table des matières qui semblait peu correspondre à ce qu'annonçait le titre !

Je me suis néanmoins mis à la lecture de cet ouvrage, l'un des plus fascinants que j'ai eu l'occasion de lire parmi tous ceux produits par nos anciens collègues.

Le livre est bien sûr anecdotique, mais il est également truffé de commentaires et de réflexions socio-politiques, culturelles, mais qui mettent toujours en relief le ferme engagement de l'auteur envers la défense et la promotion des systèmes démocratiques de gouvernement.

Dans quel univers politique vivons-nous ? Celui sur lequel John Graham attire notre attention ?

La République Dominicaine et son folklore maléfique autour de Trujillo, un exemple parmi tant d'autres des turpitudes politiques en Amérique latine et dans les Caraïbes; le ''mal de vivre'' politique endémique en Haïti; l'influence tranquille du Canada par l'entremise de religieux canadiens  ou de membres de clergés locaux qui ont fait une partie de leurs études de Séminaristes au Canada, comme le Cardinal Archevêque de Caracas ou le Cardinal Archevêque de La Havane, Jaime Ortega, une dimension souvent mal appréciée  dans nos analyses; un jugement solide et équilibré sur les situations auxquelles John fut exposé, telles qu'à la page 262 au sujet du Nicaragua ,

    

'' Yet Nicaragua is less corrupt and gang-infested and much less violent than its neighbours. In large part this is because it has the best and the least corrupt army and police force in Central America’’,

Ou encore au sujet de Cuba, à la page 50,

'' If you had to be born in a Latin American slum and if your parents understood the options and had some choice about where that would be, the chances are they would choose Cuba. Unlike the rest of Latin America, it had brought health care, education, and potentially a ladder to the bottom layers. If the alternative was illiteracy, disease, and an early death, they would look at the price as more than tolerable ‘‘,

Un beau commentaire pour les '' donneurs de leçons'' que l'on retrouve à profusion dans notre partie nord de l'hémisphère !

Ah, oui ! Un petit narcissisme!  N'oublions pas le merveilleux petit rappel de l'invasion de la Grenade, un bon vieux réflexe et un bel exemple de ''gunboat diplomacy'' !

J'ai probablement vécu les moments les plus tristes de mon expérience professionnelle à l'occasion de deux voyages que j'ai effectués à Sarajevo dans les années 90 , l'un en 1994 , je crois , pour discuter avec les autorités de la Bosnie-Herzégovine notre désir d'établir des relations diplomatiques bilatérales, et l'autre, l'année suivante, pour y inaugurer la nouvelle Ambassade du Canada en compagnie du Ministre des affaires étrangères de l'époque , Ambassade fermée depuis (rien de nouveau sous le soleil !) , et visiter entre autres lieux, le Camp de concentration d'Omarska, souvenir pathétique de la sauvagerie humaine au cœur de l'Europe contemporaine .

John apporte un autre regard sur cette région, avec la description de ses activités et les nombreuses atrocités subséquentes qui surgirent à divers endroits tel que  Srebrenica, échec de la diplomatie onusienne et internationale.

Retrouvera-t-on éventuellement John en Iraq, en Syrie ou en Lybie ?

Je lisais dernièrement qu'une récente étude de The Economist en était venue à la conclusion que l'Uruguay était la seule véritable démocratie de cette région; encore et beaucoup de ''bel ouvrage '' en perspective pour les promoteurs et défenseurs des systèmes démocratiques.

John a largement fait sa part, pour ainsi dire, et son livre aux illustrations et commentaires anecdotiques sur lesquels je n'ai pas à insister puisqu'ils me semblent toujours très pertinents et sans malice, avec ses recherches archivistiques et ses notes personnelles, constitue un magnifique exemple de quelqu'un qui a su mettre au service de la communauté internationale, l'expérience qu'il avait acquise au cours de ses années au Ministère, une évolution professionnelle à la fois inhabituelle et inusité .

Un bon livre, divertissant et enrichissant au niveau de l’information, un livre de souvenirs, à lire en 2016 !

­

Tags: Jean-Pierre Juneau